Pablo Garcia

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Gilles&John



2022-
techniques mixtes
dimensions variables



Gilles&John (01), 50x65 cm, pastel à la cire sur papier coloré, collection Communauté de Communes Sud Hérault

Cette série de dessins aux formats variables joue d’une ambiguité de vue, presque d’une paréidolie. Passioné par la contemplation des nuages, j’y cherche des agencements de formes, parfois de couleurs. Mais, depuis quelques années, cette poésie passagère me rappelle aussi souvent des moments d’émeutes, de guerillas. L’actualité s’enchainant, cette perception ne fait que se renforcer. Les images de fumées de gaz lacrymogène, fumigènes et fusées de détresse en tout genre se téléscopent de mon imaginaire vers les reliefs des nuages.

L’éphémère violence de la révolte, dans un éphémère instant de beauté dans le ciel.


Gilles&John (02), 50x65 cm, pastel à la cire sur papier coloré, collection Communauté de Communes Sud Hérault
Gilles&John (04), 48x36 cm, pastel à la cire sur papier coloré, collection particulière

Le titre traduit pour moi aussi cette ambiguïté du regard. « Gilles&John » ont été peint sur plusieurs rond-points pendant les manifestations des Gilets Jaunes. Rejoignant la pensée d’un David Dufresnes, je me suis intéressé à une poétique de la révolte populaire, à la création dans l’urgence de la contestation. Ces dessins traduisent l’ambiguïté : les multiples facettes d’un mouvement, les dérives de son action et de sa répression, tout autant de formes d’actions que de formes de nuages dans le ciel...

Cette série fonctionne sur cette dualité, coté pile et coté face, la poésie et la violence, un couple, Gilles&John.



Gilles&John (03), 30x40 cm, peinture sur papier / Gilles&John (05), 30x40 cm, peinture sur papier 
Gilles&John (09), 48x36 cm, peinture sur papier découpé
Gilles&John (07), 48x36 cm, peinture sur papier découpé / Gilles&John (08), 48x36 cm, peinture sur papier / Gilles&John (10), 30x40 cm, peinture et pastel à la cire sur papier




Gilles&John (11), quadriptyque 4 x 100x200 cm,
peinture et gravure sur bois
Vues de l’exposition Vu d’ici, Printemps Fleuriau, La Rochelle


Plus Haut (Bel-Air)



2022
acier thermolaqué
400x300x25 cm



Installation pérenne in-situ, voie verte entre Capestang et Puisserguier (34) photo Aloïs Aurelle

Plus Haut a été créée spécialement pour le pont Bel-Air sur une invitation de la Communauté de Communes Sud Hérault. Ce bas-relief s’inscrit dans mes recherches les plus récentes sur notre perception et notre lecture du patrimoine.



Installation pérenne in-situ, voie verte entre Capestang et Puisserguier (34)

Par ses couleurs anti-naturalistes, j’amène le spectateur sur le terrain de l’abstraction, de la couleur, de ses harmonies et ses dissonances. Pourtant, à y regarder de plus près, notre œil s’accroche aux formes et à l’emplacement noirci sous le pont. L’évocation du mouvement apparaît, celle de la fumée aussi. Deux mouvements pourtant contradictoires se rejoignent, deux flux dans un aller-retour de mélanges.

Je joue des ambiguïtés de perception pour nous rappeler la fonction première de ce lieu : enjamber une voie ferrée à une époque où le train était encore à vapeur. Le temps où cette fumée transformait le paysage de manière éphémère. Ici, cet événement est figé comme une résurgence de l’histoire, comme une invitation à la contemplation et au ralentissement.



Installation pérenne in-situ, voie verte entre Capestang et Puisserguier (34)

Plus Haut (Les Matelles)



2022
peinture sur contreplaqué et mur
200x280x800 cm



Vue de l’exposition Carnet d’inspirations, Maison des Consules, Les Matelles (34) 

Je tisse, ici,  une narration à partir d’un dessin paraissant abstrait au premier abord. Notre vision en est perturbée par les choix colorés, des mélanges de techniques flirtant avec le bas-relief.

Certains éléments attirent l’œil et nous pouvons alors distinguer la forme d’un fumigène.

Cette ambiguïté de la compréhension de l’objet est à rapprocher de l’ambiguïté de son usage. De détresse, le fumigène passe à militaire, puis est présent lors d’événements sportifs ou victorieux, pour enfin revenir dans le champ de la contestation populaire.

On assiste ici à un jeu sur les dimensions et notre perception visuelle.

Cette volonté est illustrée par les différentes zones de volume de l’installation, comme pour témoigner de l’ambivalence voire du paradoxe entre ce feu sacré permettant la survie individuelle, sa réappropriation en bien commun mais également sa réinterprétation ici dans l’espace.



Vue de l’exposition Carnet d’inspirations, Maison des Consules, Les Matelles (34)

La BM du Seigneur



2021
peinture et dorure à la feuille sur panneau de contreplaqué gravé
80x140, 160x140, 80x140 cm



Vue de l’exposition Buffet des anciens élèves / Ainsi squattent ils, La Chartreuse, Villeneuve-lès-Avignon (30) 

Ce triptyque, peint sur des panneaux de bois gravés, présente deux canettes de bière « de rue » Bavaria 8.6, une BMW 323i E21 blanche et une paire de Nike Air Max 90. Dans le fond doré à la feuille et ornementé, une phrase gravée se dessine « Trahi par la raison quand elle manquait à l’appel » (issu de la chanson La lettre de Lunatic, 2000).

La rue investit le patrimoine et l’espace sacré, les marques sont élevées au rang d’icône, clin d’œil irrévérencieux Au Couronnement de la Vierge d’Enguerrand Quarton. Le caractère religieux accentue la fétichisation des marques tout en figurant les symboles d’une forme de contre-pouvoir, incontrôlé. S’opère, ici, un redécoupage des récits historiques et idéologiques en insérant un scénario alternatif.

En raccourci, je représente des idoles de mon adolescence bercée par l’avènement de la culture hip-hop et de la culture de rue. Le monde est désenchanté car il est le monde, le sacré vient désigner symboliquement ce qui est à la fois saint et maudit, pur et impur, ce qui ne peut être touché sans souiller ou être souillé.

La phrase souligne ce moment si fragile de l’adolescence qui avance sur un fil. À quel moment les simples « bêtises », effets de groupe ou influences peuvent faire basculer une vie du bon ou du mauvais côté. De manière parfois irréversible.

Installation dans le cadre de l’exposition Buffet des anciens élèves / Ainsi squattent ils, Fort Saint André, Villeneuve-lès-Avignon (30)



Vue de l’exposition Buffet des anciens élèves / Ainsi squattent ils, La Chartreuse, Villeneuve-lès-Avignon (30)

Sans la nommer



2021
résine acrylique collée sur murs peints et miroir
dimensions variables



Vue de l’exposition Buffet des anciens élèves / Ainsi squattent ils, La Chartreuse, Villeneuve-lès-Avignon (30) 

Ce poème en quatre strophes, écrit par Marguerite Foil pour l’exposition, se déploie à la Chartreuse et au musée Pierre-de-Luxembourg. Trois strophes sont écrites, ici, sur les murs de trois cellules et la dernière au musée.

Le texte est écrit à l’aide d’un abécédaire prélevé dans les graffitis du fort Saint-André, surplombant la ville. Les lettres sont en « relief » par rapport à leurs situations d’origine en « creux », gravées dans la pierre.

Ces procédés de moulages induisent un texte présenté en miroir. Non lisible d’emblée, il faut le décrypter, l’expérimenter pour accéder au sens. Cet écart avec le réel et sa lecture immédiate sont aussi une référence à l’architecture de la Chartreuse ; tous ces points de vue créés par les percées dans les murs de la bugade, des passe-plats ou la structure des cloîtres.

Ce poème est un rappel des voix adolescentes qui ont résonné à la bugade de la Chartreuse, dans ce patrimoine habité pour ce qu’il était : des bâtiments à investir, à vivre.

Comme dans une continuité permanente les cimaises sont repeintes avec des peintures des expositions précédentes. Venir s’intercaler comme une étape supplémentaire dans l’occupation de ces lieux.



Vue de l’exposition Buffet des anciens élèves / Ainsi squattent ils, La Chartreuse, Villeneuve-lès-Avignon (30)


Abandonnés.
Aux paniques, se mêlent leurs respirations,
ils errent sans voix, brouillent l’air froid.
Dans la torpeur des solitudes, le désir s’est barré par la fenêtre.
Les yeux noirs, plantés près du couteau, scrutent.

Le parfum des fleurs d’oranges laisse glisser le froid des murs.  
Méprisé ? Médusé ? Qu’as-tu ? Juste un baiser ?
Baisse le ton ! Les corps déchaînés, ne veulent plus de sommeil.
Saute par terre, les rôdeurs ont remporté la bastide, l’enfance est aux abords.

Plus loin, dans les forêts cachées, sur les feuillages aplatis,
ils ont dormi un temps, dans l’abondance des contrées sauvages.
En tumulte, manger la peau, mordre : le miel cuit, le sucre au bord de la langue.
Que cherches-tu en l’embrassant ?

De feux, de mots, le temps souple frôle les amoureux vaillants.
Vivre plus loin. Les nuits étranges s’entassent devant les portes.
Ils jonglent sans comprendre, s’étonnent des rêves nouveaux.
Les fruits plus doux viennent un jour, n’est-ce pas ?


Installation dans le cadre de l’exposition Buffet des anciens élèves / Ainsi squattent ils, Fort Saint André, Villeneuve-lès-Avignon (30)


Vue de l’exposition Buffet des anciens élèves / Ainsi squattent ils, La Chartreuse, Villeneuve-lès-Avignon (30)



Vue de l’exposition Buffet des anciens élèves / Sous le signe du V, Musée Pierre-de-Luxembourg, Villeneuve-lès-Avignon (30)